Dictionnaire de Métronimo
Dictionnaire pratique et historique de la musique
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Chromatisme
Nom masculin.
Emploi du genre chromatique dans la composition. Connu théoriquement depuis l'antiquité et pratiqué par les peuples orientaux, le chromatisme resta jusqu'à la fin du moyen âge étranger aux nations occidentales, exclusivement attachées au genre diatonique. La « permutation » d'un son sur le même degré, par le moyen d'un signe d'altération accidentelle, que Marchetto de Padoue proposait (XIIIe-XIVe s.) pour « colorer » la musique, était le germe du chromatisme. Bien que présent dans les doctrines de la Musica ficta, il ne se développa qu'au XVIe s., sous la double pression des progrès de la musique instrumentale et des efforts tentés par les humanistes pour réveiller les souvenirs du monde antique. Tandis que Zarlino et Vicentino se livraient à de savantes dissertations et à des essais de construction de clavecins permettant la comparaison des trois genres, les compositeurs essayaient de créer des harmonies nouvelles en introduisant dans leurs œuvres les demi-tons chromatiques. Cyprien de Rore, un des meilleurs représentants de cette tendance, intitula « chromatiques » les madrigaux de son premier livre (1544). On trouve dans son œuvre une Ode à quatre voix sur le thème :

Les maîtres de la fin du XVIe s. aperçurent bientôt les ressources expressives du chromatisme, et ils en associèrent l'emploi aux paroles faisant allusion aux larmes, aux douleurs, aux plaintes :

Les instrumentistes y trouvèrent un enrichissement du tissu harmonique et l'attrait d'un jeu nouveau. Une Fantaisie chromatique figure dans l'Organo suonarino de Banchieri (1605), une Toccata et un Ricercar chromatique dans les Fiori musicali de Frescobaldi (1635) :

De l'extension donnée pendant le XVIIe s. au rôle du chromatisme dans la composition mélodique et harmonique résulta l'abandon de l'ancien système modal des 8 ou des 12 modes diatoniques et leur remplacement par le système modulant, à base unique, de la tonalité moderne. Bach, « toujours en avance sur son siècle », y puise tantôt de discrètes nuances expressives et tantôt un élément de variété mélodique ou un procédé de modulation, définitive ou passagère, dont ce passage de sa Toccata en fa a été cité comme un exemple hardi :

La période dite des « grands classiques » continue sur ce point la technique de Bach. Mais c'est dans la seconde moitié du XIXe s. que Wagner imprime au mouvement de la tonalité vers le chromatisme une impulsion décisive, de plus en plus marquée dans ses œuvres successives, jusqu'à Tristan et Isolde (1865). Désormais, selon les paroles de Gevaert, s'ouvre devant les compositeurs modernes le « domaine sans limites » de la polyphonie chromatique, qui « met en œuvre, sous l'hégémonie d'une tonique majeure, tout le matériel contenu dans les dix-sept sons de la série chromatique complète ».


Voir aussi: Gamme

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